VISITE DE XI JINPING EN FRANCE: COMMENT SE PORTE LA SECONDE éCONOMIE MONDIALE?

La Chine a fixé à "environ 5%" son objectif de croissance cette année, un but identique à celui annoncé pour 2023. Si un tel chiffre a de quoi faire pâlir les économies européennes, engluées dans des taux de croissance faméliques, et même les États-Unis qui sont à 2,5%, c'est un standard relativement bas pour la Chine, habituée à un rythme de croissance effréné depuis près de trois décennies. Mais le Covid a laissé des traces profondes.

Cet objectif de 5% sera "difficile à atteindre", a reconnu le Premier ministre Li Qiang, en raison des "risques persistants et des dangers cachés" qui subsistent dans l'économie chinoise.

Si l'OCDE a relevé sa dernière prévision de croissance de 4,7 à 4,9% pour la Chine en 2024, le FMI table plutôt sur 4,6%, signe que le ralentissement de l'économie chinoise se poursuit.

Redémarrage poussif

En 2023, le Produit intérieur brut (PIB) du géant asiatique a progressé officiellement de 5,2%, son rythme le plus faible depuis 1990 (3,9%), hors période de Covid, et jugé surestimé par nombre d'économistes. Ce taux ferait rêver nombre de nations développées, mais il reste pour la Chine bien loin de l'expansion fulgurante qui l'a propulsée ces dernières décennies vers les sommets de l'économie mondiale.

Le pays a récemment annoncé une hausse de son PIB de 5,3% au premier trimestre mais par rapport au quatrième trimestre 2023, comparaison plus fidèle de la conjoncture, celui-ci progresse plus modestement (+1,6%).

La reprise économique tant espérée fin 2022 à la sortie du Covid a été brève et moins robuste qu'escompté. Si certains secteurs ont largement retrouvé des couleurs (notamment les services et le tourisme), d'autres restent à la peine, en particulier l'immobilier qui a longtemps été en Chine un moteur de la croissance. Voici les principales difficultés auxquelles se heurte la deuxième économie mondiale.

Un secteur immobilier toujours en difficulté

L'immobilier, qui a connu deux décennies de croissance fulgurante avec la hausse du niveau de vie de la population, a longtemps représenté au sens large plus du quart du PIB de la Chine. Mais le secteur est désormais sous pression, avec certains promoteurs au bord de la faillite (Evergrande, Country Garden...) et des prix en chute qui dissuadent les Chinois d'investir dans la pierre, le tout sur fond de ralentissement économique.

Pour tenter de relancer l'activité, le pouvoir multiplie mesures incitatives et annonces rassurantes. La Chine a notamment publié une liste de chantiers éligibles à un soutien financier, alors que les logements y sont souvent payés avant même leur construction.

Mais les mesures de soutien de Pékin au secteur n'ont eu pour le moment que peu d'effets. Au premier trimestre, les investissements dans l'immobilier s'affichent ainsi en repli sur un an (-9,5%), selon le Bureau national des statistiques.

Logiquement, les principales villes de Chine ont de nouveau enregistré en mars une baisse des prix de l'immobilier. Sur 70 villes qui composent l'indicateur officiel de référence, 58 étaient ainsi concernées (contre 51 en mars 2023, signe de dégradation de la situation), selon les chiffres du BNS.

L'immobilier souffre depuis 2020 d'un durcissement par Pékin des conditions d'accès au crédit pour les promoteurs immobiliers, afin de réduire leur endettement.

Le chômage des jeunes pèse sur la consommation intérieure

Un taux de chômage élevé chez les jeunes (15% fin 2023 selon les chiffres officiels ajustés) et les incertitudes liées à la conjoncture fragilisent la consommation, moteur traditionnel de l'économie chinoise. Après avoir enregistré la plus forte contraction des prix à la consommation depuis 14 ans, la deuxième économie mondiale est sortie en février de déflation pour la première fois en six mois.

En mars, les ventes au détail, principal indicateur des dépenses des ménages, se sont cependant tassées (+3,1% sur un an), après une hausse de 5,5% en janvier et février cumulés. Le même mois, la production industrielle s'est également essoufflée (+4,5% sur un an), après une hausse de 7% en début d'année.

Faute de demande, les entreprises sont contraintes de réduire leur production et de faire de nouvelles ristournes pour écouler leurs stocks, ce qui pèse sur leur rentabilité et l'emploi. Pour stimuler l'activité, le président Xi Jinping a notamment préconisé de renouveler les biens de consommation, une mesure qui laisse dubitatifs les économistes.

Premier repli des exportations en sept ans

Pour la Chine, souvent qualifiée d'"atelier du monde", les exportations sont un levier de croissance essentiel. L'an dernier, elles ont connu leur première contraction depuis 2016 en raison d'une demande mondiale fragilisée par l'inflation. Une conséquence de la baisse de la demande mondiale en biens chinois, dans un contexte d'inflation dans les économies développées.

Les tensions géopolitiques avec les États-Unis expliquent également cette tendance: les échanges commerciaux entre les deux premières économies ont reculé pour la première fois depuis 2019. Ceux entre la Chine et la Russie ont à l'inverse atteint un niveau record en 2023, à la faveur d'un rapprochement depuis la guerre en Ukraine. Mais la Russie est loin de compenser la demande américaine et surtout celle de l'Union européenne, qui sont les deux principaux débouchés de la Chine.

Et cela pourrait ne pas s'arranger puisque l'UE multiplie actuellement les enquêtes contre les subventions chinoises sur les véhicules électriques, les panneaux photovoltaïques, les éoliennes ou encore les marchés publics de dispositifs médicaux. Avec à la clé de potentielles mesures de rétorsion qui pourraient affecter les exportations chinoises vers l'Europe.

Chute de 82% des investissements étrangers en 2023

Les investisseurs étrangers se montrent aussi plus frileux vis-à-vis de Pékin. L'an dernier, les investissements étrangers en Chine ont ainsi chuté de 82% selon les chiffres officiels, ce qui les a amenés à leur niveau le plus bas depuis 1993, selon SinoInsider, un cabinet spécialisé dans l'économie chinoise basé aux États-Unis. Cette morosité se répercute sur les Bourses chinoises, qui sont d'une manière générale orientées à la baisse depuis de nombreux mois.

Une intervention du pouvoir via un fonds souverain a récemment permis d'inverser temporairement la tendance. Il y a quelques semaines, le gouvernement a annoncé l'émission de 1.000 milliards de yuans (128 milliards d'euros) d'obligations d'État pour "renforcer les capacités" de la Chine dans des domaines clés. Parallèlement, 3.900 milliards de yuans (près de 500 milliards d'euros) d'obligations seront émises pour soutenir les collectivités locales, aux finances exsangues.

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